samedi 3 avril 2010

le 11 mai, 9h: Atelier IX: Traduction et arts visuels (54, bd Raspail)

(9h-10h30)
Atelier IX:
Traduction et arts visuels.

(salle 524 au 54, bd Raspail)

Président : Jean-Marie Gallais (EHESS)
The Labours of Translation: Towards Utopia in Bruegel's Tower of Babel. Vytas Narusevicius (Canada. University of British Columbia)
« On the collapse » : Mistranslation dans les arts. Sébastien Pluot (France. ESBA Angers / Université Paris I)
L’œuvre d’art comme parallaxe entre l’image et le langage: l'impossible traduction. Neli Dobreva (France. EHESS/NMAH-Smithsonian Institution, USA)

Abstracts /Résumés/ Zusammenfassungen
The Labours of Translation: Towards Utopia in Bruegel’s Tower of Babel by Vytas Narusevicius.
The two remaining paintings of the Tower of Babel by Pieter Bruegel the Elder appear to embody an anticipation of a multiplicity of tongues in the same way that theorist Louis Marin describes Thomas More’s Utopia as having an “anticipating, but blind, judgement.”[1] In other words, More’s Utopia and Bruegel’s Towers are not conventional representations of a realized vision, but rather they can be understood as a process where a utopian ideal is yet to be discovered. The utopian discourse that is present in the works of Bruegel and More allows a modernizing sixteenth-century society to represent itself critically to itself, thus becoming useful to its audience by enabling a kind of problem solving capacity to think through the emerging social, political and cultural changes. Bruegel’s paintings are clearly translating a biblical story into a ‘speaking picture’ by depicting a ziggurat-like tower reaching towards the heavens, yet at the same time they appear to be doing something more by recreating an event, albeit a mythical event, and its consequences. There is a multitude of sources that have come together to inform Bruegel’s original paintings, yet there is a multiplicity of contradictions depicted within them and, not surprisingly, there is a plurality of translations or interpretations. The point of departure for this paper is that within this multiplicity of tongues and labours of translation there is a kind of bewildering individual freedom that can be said to have risen out the ruins of Babel. Bruegel’s representation of the contrast between the floundering hubris of a King and the industriousness of his subjects involves the translating or re-authoring of the original story, which also implies a challenging of the authority of the original and the subsequent importance of both the process of translation and self-narration for any kind of social transformation. In Bruegel’s Towers, I am interesting in analyzing whether the notion of translation and labour can help locate how, and whether, these paintings speak in both a utopian spirit of social critique and to a resistance of authority.
[1] Louis Marin, Utopics: Spatial Play (New Jersey: Humanities Press Inc., 1984), 163.

« On the collapse » : Mistranslation dans les arts. Sébastien Pluot.
Depuis le mythe babélien d’une langue unique et universelle, les recherches d’une langue philosophique fondée sur les mathématiques de Leibnitz, les théories des correspondances, les efforts de Kandinsky pour élaborer une science de l’art basée sur un lexique universel, et plus récemment l’idéologie positiviste d’une traduction sans perte aidée par l’informatique, le fantasme d’une communication immédiate traverse chaque époque. Opposée à ce fantasme, l’opacité, la posture de l’ineffable et de l’indicible semble être le versant tragique de la transparence. Il sera question d’interroger la manière dont certaines pratiques artistiques ont dépassé ces deux postures pour proposer des formes dialectiques qui rejoint les formulations de Jacques Derrida lorsqu’il évoque la situation de double Bind inhérent à tout processus de traduction. Cette intervention reposera sur une exposition dont je suis co-commissaire « Double Bind, Arrêtez d’essayer de me comprendre », qui développe cette problématique au Centre National d’Art Contemporaine de la Villa Arson. (Février / mai 2010)

L’œuvre d’art comme parallaxe entre l’image et le langage : l’impossible traduction. Neli Dobreva.
En septembre 2002, l’artiste new yorkais Eric Fischl, connu depuis les années 1970 pour son travail figurative installe, au Center Rockefeller à New York, son nu féminin, grandeur nature, bronze, intitulé Tumbling Woman (2001-2), représenté en position de chute libre, soulevé à quelques mètres du sol, en apparence éternellement suspendue : un corps féminin qui chute, dans un moment insaisissable – juste avant de toucher le sol ! Après seulement une semaine d’exposition, la sculpture Tumbling Woman (2001-2), dédiée à une amie ayant périe dans les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, est couverte d’un drap et enlevée à cause de l’outrage publique. En contraste, un nu féminin d’Auguste Rodin, découvert parmi les restes humains et les débris des avions, à la déchèterie « Fresh Kills » de Staten Island, a été réhabilité malgré son état de fragment : une place spéciale dans la collection du New York State Museum, dédiée aux attentats, lui a été attribuée. La problématique que ces deux œuvres pose se reconnaît dans la thèse de l’« image à transformation » (Deleuze) : d’abord en termes du visuel (d’image plastique, du corps) et du réel ; deuxièmement, de représentation - qui est de l’ordre discursive et donc du langage (comment décrire l’horreur ?). Pourquoi ce corps fragmenté, morcelé (en termes de Lacan), du nu de Rodin n’a pas sollicité de l’outrage public, tandis que Tumbling Woman a été condamnée à être « voilée » ? C’est un exemple de conflit entre identité culturelle (le tabou qui plane sur l’image de la mort dans la société américaine dû à son discours d’exceptionnalisme) et transmission de formes de connaissance culturelle. Serait-ce un exemple qui fait figure de parallaxe comme illusion d’être capable d’utiliser le même langage pour des phénomènes qui s’expriment en perspectives et entre qui aucune synthèse ou médiation n’est possible (Kant, Zizek) alors que sur l’image il y a toujours l’ombre de l’écriture (Boehm) ? Ainsi, serait-ce démontrer, en termes Benjaminiens, « l’impossibilité de la théorie de l’image-copie », les limites mêmes de traduire le réel et sa représentation ?

BIOS:
Vytas Narusevicius is a PhD student at the University of British Columbia in Vancouver, Canada. His interests are in the notion of pedagogy as art, and in particular contemporary artists who use pedagogy and academic research as integral aspects of their artistic practices. Vytas is working with UBC faculty members, Serge Guibaut, Catherine Soussloff, and Bronwen Wilson. Prior to UBC, Vytas received a Master of Applied Art in Visual Art at Emily Carr University and has exhibited his artwork internationally.

Sébastien Pluot est historien de l’art et commissaire indépendant. Il enseigne à l’Ecole Supérieure des Beaux Arts d’Angers et à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne. Commissaire indépendant, il a réalisé récemment un programme de recherche et d’exposition intitulé Living Archives à l’Esba Angers et au San Francisco Art Institute. Ses textes ont été publiés dans différentes revues et catalogues (Include Me Out, dans Vides, une rétrospective, Centre Georges Pompidou, Kunsthall de Bern, 2009 / Wouldn’t that be Wonderful, actes du colloque Art Contemporain Design Contemporain, Haute école d’art et de Design de Genève, 2008). Il vient d’être lauréat de la Villa Médicis hors les murs.


Neli Dobreva
est Research fellow du National Museum of American History – Smithsonian Institution, Washington DC, Etats-Unis, affiliée au Centre d’histoire et théories de l’art de l’EHESS et ingénier d’études à la Fondation Maison des Sciences de l’Homme à Paris ; elle enseigne la Philosophie de l’art au Département d’Arts plastiques et sciences de l’art de l’Université Paris 1 « Panthéon-Sorbonne ». Son domaine de recherche est l’intersection des concepts du corps, de l’image et du réel chez Gilles Deleuze, Ludwig Wittgenstein et Jacques Lacan, et les discours des images des événements du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis (collections muséales, expositions).

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