samedi 3 avril 2010

le 11 mai, 9h: Atelier VIII: La traduction est-elle un travestissement du texte originel? (105, bd Raspail)

(9h-10h30)
Atelier VIII :
La traduction est-elle un travestissement du texte originel ?

(Amphithéâtre au 105, bd Raspail)

Présidente : Francoise Delignon (EHESS)
Translation as co-creation: What can myth tell us about the author? Julia Sushytska (États-Unis. Université de Redlands)
L’autotraducteur : passeur de mots, passeur de culture. Etude d’un essai de Jorge Semprún. Valérie Capdeville-Hounieu (France. Université de Pau)
Intercontextualité, traduction et le problème de la subjectivité à partir de la modernité. Rada Iveković (France. Université de St. Etienne)


Abstracts /Résumés/ Zusammenfassungen
Translation as co-creation: What can myth tell us about the author by Julia Sushytska.
The question of the text’s translatability arises only in the context where a strict distinction is maintained between the original and its copy, that is, it can emerge as a problem in the literary societies, or cultures build around phonetic alphabet.[1] It is in such cultures that the notion of authorship coalesces—the notion that includes the idea that an individual, or the self originates a literary work, and gives this work a specific form that ought to remain changeless throughout its consequent reproductions. Even if we are lead to believe that it is possible to adhere to this principle of the unalterability when we are dealing with the language of the original, we are faced with its inapplicability when it comes to translation—after all it is impossible to deny the difference between any two languages. If we were to consider the context of an oral culture, however, we would notice that in it there is no author, and so such problem. Its “texts”—myths—do not claim to have stable form. In fact, they cannot, since it is impossible to check them against any earlier instance of their iteration. Every oral text exists only in the process of being created. Moreover, it has multiple authors—each one reciting it becomes a co-author. Drawing upon these observations I will argue that we need to reconsider the opposition between the original and the copy in the literary culture. I will draw on the work of Gilles Deleuze who successfully challenges this dichotomy, thereby enabling us to rethink the notion of authorship: instead of one single author we need to conceive of a text as co-authored by both its readers and translators.
[1] Cf. Walter J. Ong, Orality and Literacy: The Technologizing of the Word, London: Routledge, 1991.

L’autotraducteur : passeur de mots, passeur de culture. Etude d’un essai de Jorge Semprún. Valérie Capdevielle-Hounieu.
On sait depuis Saussure qu’il n’y a pas d’équivalences exactes d’une langue à l’autre. La traduction, celle en particulier de textes ayant une dimension esthétique ou littéraire, est donc un art du saisissement et de la restitution toujours imparfaite d’une nuance. Qu’en est-il alors de l’autotraduction ? Cette question se pose essentiellement dans le cas des écrivains en langue seconde tels que Jorge Semprún, Espagnol dont la production est majoritairement en français. Carlos Fuentes se fait l’écho du fantasme d’autotraduction en s’ouvrant de la possibilité qu’aurait eue Jorge Semprún d’écrire et réécrire son premier roman, Le Grand Voyage, par le jeu de l’autotraduction. Chaque livre, l’original et originel en français, puis l’espagnol, puis une nouvelle traduction en français, et cela à l’infini, aurait été, de l’aveu de Semprún, « un livre différent ». Pourquoi l’autotraduction est-elle, au même titre que la traduction, une réécriture ? Du fait du bilinguisme et du biculturalisme de l’auteur concerné, ne pourrait-on attendre de l’autotraduction une plus grande fidélité au texte d’origine ? Est-elle en mesure de transcrire la part proprement culturelle d’une langue ? En a-t-elle d’abord l’intention ? Jorge Semprún a été une fois le traducteur de son propre texte. Il s’agit du récit de son expérience en tant que Ministre de la Culture du gouvernement de Felipe Gonzalez, Federico Sanchez vous salue bien (1993). Son statut de témoignage et de réflexion politiques et sociologiques expliquent en partie la spécificité de ce travail : entre fidélité au texte premier et liberté créatrice, c’est surtout la prise en compte et l’adaptation au lectorat visé qui ont présidé à l’écriture de Federico Sanchez se despide de ustedes. Pour satisfaire l’attente et favoriser la compréhension du lecteur espagnol dont les références sont différentes, l’écrivain réoriente son texte. Il conviendra donc d’analyser l’influence de la réception sur la traduction de Semprún du point de vue de la sélection des informations, des ajouts, de l’insertion de mots en français, etc. On s’attachera au discours métanarratif relatif à la traduction qui parsème le texte et à la comparaison des deux versions de l’essai afin de mettre en lumière le dialogue entre la langue/la vision du monde qu’elle véhicule et la traduction d’un texte.

Intercontextualité, traduction et le problème de la subjectivité à partir de la modernité. Rada Iveković.
La modernité fut l’une des grandes disjonctions qui ont gelé certaines normes historiques en les rendant exemplaires: depuis ce temps, la modernité occidentale (d’abord occidentale, puis “occidentale” et finalement “universelle”…) a construit une origine généalogique ininterrompue pour ses propres concepts et épistèmês en tant qu’”universels” pour les proposer/imposer à la planète. Dans le même temps, la figure du sujet est construite par une division et un partage porteur de significations opposées. A partir de la modernité, il y eut continuité pour l’”occident” et interruption pour les cultures, histories et langues non européennes. Pour ces dernières il n’y a en effet que discontinuité d’avec leurs propres antiquités, vu du point de la modernité occidentale. Les modèles d’exclusion, de sélection et d’exception de la modernité, qui posent le sujet comme une figure “autonome”, spéculaire et complémentaire à la souveraineté (étatique) n’ont pas complètement disparus aujourd’hui, et ils renvoient à un modèle hégémonique dominant. Nous voyons la traductions comme étant inhérente au langage, et non pas comme quelque chose qui se passe (simplement) entre les langues. C’est une négociation permanente de déplacements culturels et autres. Nous considérons alors qu’elle est intercontextuelle.

BIOS:
Julia Sushytska is Assistant Professor of Philosophy at the University of Redlands. Her research focuses on the problem of philosophy’s emergence in Ancient Greece, especially in the works of the pre-Socratics and Plato, as well as on the recent effort of Gilles Deleuze and Alain Badiou to rethink philosophy’s task. Her manuscript entitled Originary Metaphysics: Why Philosophy has not Reached its End is currently under review with Northwestern University Press. She has also written on the philosophical significance of Eastern Europe.

Valérie Capdevielle-Hounieu
: Doctorante en Langue et Littérature françaises à l’Université de Pau, Valérie Capdevielle-Hounieu travaille sur le bilinguisme et le biculturalisme de l’écrivain Jorge Semprún. Valérie Capdevielle-Hounieu a notamment communiqué et publié (en France et à l’étranger) autour des questions du métissage littéraire, de l’identité ou du renouvellement du genre autobiographique dans la littérature contemporaine. Membre élu du Conseil de la Recherche et du Conseil de l’Ecole Doctorale 481, Laboratoire de Poétique et histoire littéraire, Université de Pau et des Pays de l’Adour.

Rada Ivekovic, philosophe indianiste, directrice de programme, Collège international de philosophie, Paris, professeure à l’Université de Saint-Etienne, a enseigné dans plusieurs pays. Publications : Selection : La balcanizzazione della ragione, manifestolibri, Roma 1995; Le Sexe de la philosophie. Jean-François Lyotard et le féminin, L'Harmattan, Paris 1997; Autopsia dei Balcani. Saggio di psico-politica, Cortina, Milan 1999; Le sexe de la nation, Paris, Léo Scheer 2003; Dame Nation. Nation et différence des sexes, Ravenna, Longo 2003; Captive Gender. Ethnic Stereotypes & Cultural Boundaries, Delhi, Women Unlimited, 2005; with S. Bianchini, S. Chaturvedi, R. Samaddar, Partitions. Reshaping States and Minds, Routledge 2005; reprint Delhi 2007.

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