dimanche 4 avril 2010

le 10 mai à 14h30: Atelier V: Interculturalité et musicologie (54, bd. Raspail)

(14h30-16h)
Atelier V :
Interculturalité et musicologie.

(salle 445bis au 54, bd. Raspail)

Président : Esteban Buch (EHESS)
La traduction interculturelle dans la chanson : de Luther au 20e siècle. Philippe Desse (France. Compositeur. Collège Landowski)
Translating Jewishness: The Berlin and Kraków klezmer scene as a site of intercultural encounters. Magdalena Waligorska (Allemagne. European University Viadrina, Frankfurt)
Traduire le populaire poétique : Brassens en espagnol. Isabelle Marc Martínez (Espagne. Universidad Complutense de Madrid)

Abstracts /Résumés/ Zusammenfassungen
La traduction interculturelle dans la chanson : de Luther au 20e siècle. Philippe Desse.
Cette communication se propose de replacer les problématiques liées à la traduction dans une perspective interdisciplinaire nouvelle impliquant langue, littérature, civilisation et musique, à partir de chansons traduites. En effet, dès lors que l’on introduit la composante supplémentaire du langage musical, de nouvelles contraintes spécifiques apparaissent dans la traduction : métrique (respect des syllabes longues et courtes à caler sur les durées de notes adéautes), tons et accents à placer sur leur équivalent musical, difficultés engendrées par les langues « atones »… Contraintes restrictives ou porteuses d’un nouveau savoir-faire, d’un nouveau genre littéraire ou musical ? Cette question prend tout son sens, ne serait-ce qu’avec la traduction par Luther de la Bible gréco-latine en langue vernaculaire, à l’origine d’un genre musical inédit : le Choral, venant remplacer le chant grégorien en latin, moins propice au « calibrage » de la langue allemande. Favorisant l’émergence d’enjeux nouveau (chez Luther, volonté d’expansion religieuse), la traduction des chants constitue à d’autres époques un acte politique et culturel fort, mais non dénué d’ambiguïté : « l’importation » commerciale d’une chanson à succès traduite relève-t-elle d’une démarche protectionniste face à un éventuel impérialisme linguistique, ou bien le prépare-t-ell ? Puisque la musique constitue le « véhicule » de la traduction, on abordera en conséquence la massification du public destinataire de ces traductions, un public non plus limité à un cercle restreint d’intellectuels, mais s’étendant à la nation toute entière. A nouveau public, nouvelles exigences, qu’il convient de considérer soigneusement en cas de transplantation, surtout si la vision socio-culturelle du texte-source entre en conflict avec celle de la culture cible (exemple : la vision divergente de l’amour et des relations homme/femme selon les pays). Quel équilibre maintenir entre les désirs supposés d’un public qui n’adhérerait aux propos d’une chanson étrangère qu’au prix d’une conversion culturelle, et sa soif d’exotisme comblée par les stéréotypes habituels attachés à tel peuple ? Comment corriger un trop grand éloignement par rapport au texte-source ? (utilisation de paramètres plus ou moins exogènes à la traduction : maintien partiel de la langue d’origine, accent artificiel du chanteur, couleur locale assurée par l’aspect physique, les manières, l’habillement, instrumentation connotée…) Voilà donc quelques pistes de réflexion autour desquelles s’articulera cette communication en prenant pour exemple des chansons traduites allant de Luther jusqu’aux succès de la variété française contemporaine.

Translating Jewishness: The Berlin and Kraków klezmer scene as a site of intercultural encounters, by Magdalena Waligorska
The Berlin and Kraków klezmer scene as a site of intercultural encounters. Klezmer music, a folk genre of the Jewish communities of Central and Eastern Europe, has witnessed a dynamic revival in the last two decades. Making its way to world music festivals, clubs and discos, klezmer not only changed its original function (Jewish wedding music), but also became a transcultural phenomenon, performed mostly by non-Jewish musicians, and appealing to non-Jewish audiences. This non-Jewish appropriation of neo-klezmer provoked many controversies in Poland and Germany, with critics alarming about “virtual Jewishness”, “Jewish Disneyland” or even “cultural necrophilia”. Determined by appropriation, adaptation and cultural translation, klezmer music provides a contact zone for Jews and non-Jews, where new forms of transcultural performance, representations, discourse and identities are created. The klezmer revival not only inspires new ways of performing Jewish space, or Jewish body, but also generates a new kind of language, full of neologisms or mock-Yiddish expressions. The end-products of this translation, such as neue gojische Musik [new non-Jewish music] of the Bremen-based band Klezgoyim [goy being a Yiddish derogative for a Gentile], or the Cracovian “Chopin á la klezmer” represent the creolised, translated Jewishness, which is recognisable on a certain level to both Jews and non-Jews, but impossible to classify in a clear-cut dichotomy of Jewish vs. non-Jewish heritage. Selection, distortion and multivalent readings of klezmer made in Kraków and Berlin sometimes tend towards stereotyping and simplifications, but also reflect a desire to incorporate or “domesticate” the Other. Using postcolonial theories of contact zone, creolisation and cultural anthropofagy, I look at klezmer as a kind of creole language: basing on the building blocks of the Jewish tradition, but filtered through the sensitivity of non-Jewish Poles or Germans. I will illustrate the process of cultural translation on the klezmer scene not only with musical examples but also with visual and linguistic material.

Traduire le populaire poétique: Brassens en espagnol. Isabelle Marc Martínez.
Face aux soupçons d’impossibilité ontologique de la traduction, la traduction de chansons révèle à la fois l’extrême complexité des processus traducteurs dans les transferts culturels et leur viabilité pragmatique. En effet, dans le contexte des musiques amplifiées, considérées comme objets culturels et commerciaux, comme formes d’une nouvelle poésie populaire et médiatisée, les chansons constituent des textes hybrides où la musique, les paroles et la performance s’allient dans la construction du sens. Notamment, dans la chanson d’auteur, les paroles sont perçues comme de véritables textes poétiques, définis, en tant que tels, par leur poids sybmolique-sémantique et par leur littéralité et immutabilité. C’est pourquoi, la traduction de chansons a recours aussi bien aux mécanismes de la traduction audiovisuelle qu’à ceux de la traduction poétique. De la seule traduction de paroles, publiées sous forme de livre, à l’enregistrement d’une version librement adaptée, il existe des modalités différentes, affichant des stratégies et des skopos variables dans chaque cas. En sa qualité d’exemple proéminent de cette problématique générale, nous analyserons la réception /traduction /adaptation dans le contexte hispanophone de l’oeuvre de Georges Brassens, un des mythes culturels de la France du XXe siècle, Prix de la poésie pour l’ensemble de son oeuvre en 1967. Qui traduit Brassens en Argentine, au Chili ou en Espagne? Pourquoi ? Quel est le skopos idéologique, symbolique et commercial de ces traductions? Dans quelle mesure ont-elles remplacé l’original dans les versions à succès telles que « La tormenta » de Javier Krahe ou « La mala reputación » de Loquillo? Comment le public français perçoit-il les chansons de Brassens lorsqu’elles sont interprétées par Paco Ibáñez à l’Olympia? Quel est le poids de ces traductions dans la configuration symbolique, culturelle et identitaire des cultures d’arrivée? Nous nous interrogerons donc sur les enjeux des chansons en tant qu’objets traductologiques et en tant qu’éléments décisifs dans la construction des cultures populaires transnationales contemporaines.

BIOS:

Philippe Desse
: est professeur agrégé de musique et titulaire d’un D.E.A d’études germaniques, compositeur de musiques de scène (comédies musicales, opéras de chambre, etc.), membre du jury aux épreuves pratiques du CAPES, a participé à des émissions radiotélévisées. Domaine de recherches : interdisciplinarité langues/musique (allemand, anglais, latin, hébreu), application à la pédagogie des langues par le biais de la musique.

Magdalena Waligórska
: holds a PhD in history from the European University Institute in Florence, where, in 2009, she completed her dissertation on the klezmer scene in Kraków and Berlin. She is currently a research fellow of the Deutsches Polen Institut in Darmstadt and teaches at the Department of Cultural Studies of the European University Viadrina in Frankfurt (Oder). Her publications include, among others, articles in Osteuropa, Polish Sociological Review and Ethnomusicology. She is also the co-editor of Cultural Representations of Jewishness at the Turn of the 21 Century, forthcoming 2010.

Isabelle Marc Martínez
(Universidad Complutense de Madrid) : Diplômée de l’Université de Salamanca et de l’Écoles Supérieure d’Interprètes et de Traducteurs de Paris, docteur en Philologie Française par l’Université Complutense de Madrid où elle enseigne la Traduction depuis 10 ans, elle a publié un livre et plusieurs articles sur les enjeux poétiques et esthétiques du rap français. Par ailleurs, elle est traductrice éditoriale (+ de 18 ISBN) et traductrice assermentée. Ses thèmes de recherche sont la culture française contemporaine (musique amplifiées et roman) et la traduction.

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